EXCLUSIF. En 2007, Robert Peugeot, avant de quitter la direction de PSA pour gérer l’argent de son clan, s’était assuré une retraite annuelle de 456 153 euros.
Par Christophe Labbé et Mélanie Delattre
Bis repetita. On se souvient du tollé provoqué en 2013 par la retraite chapeau du patron de PSA Peugeot Citroën. Alors que le groupe annonçait 8 000 suppressions d’emploi, l’entreprise avait provisionné pour les vieux jours de son patron 21 millions d’euros. Face aux protestations, Philippe Varin avait proclamé qu’il renonçait aux 299 000 euros brut annuels qui lui avaient été contractuellement garantis. Las, deux ans plus tard, on découvrait que l’ex-PDG n’avait pas tenu promesse, s’octroyant finalement une retraite chapeau de 179 000 euros par an. Selon les informations du Point, Philippe Varin n’est pas le seul haut dirigeant du groupe à avoir « rusé » pour s’assurer une retraite en or.
Robert Peugeot, qui tient les rênes du holding familial actionnaire à 14 % de PSA, bénéficie lui aussi depuis l’an passé d’un généreux complément de retraite. Un avantage secrètement négocié du temps où il était encore membre du comité exécutif du constructeur. En 2007, lorsqu’il quitte la direction de PSA pour gérer l’argent du clan, ce membre éminent de la fratrie s’assure pour ses vieux jours une rente annuelle de 456 153 euros. À l’époque, il n’a que 56 ans. Normalement, en abandonnant son poste de directeur innovation et qualité au sein du groupe pour basculer chez FFP, Robert Peugeot renonçait de fait à son droit à une retraite chapeau payée par PSA. En effet, il faut être salarié de l’entreprise au moment où l’on fait valoir ses droits pour pouvoir en bénéficier.
Situation de conflit d’intérêts
C’est là que le tour de passe-passe intervient. D’après des documents dont Le Point a eu connaissance, Robert Peugeot avait obtenu du comité de rémunération en 2007 un statut sur mesure : son contrat de travail n’a pas été interrompu à son départ, mais suspendu. Plus étonnant encore, le montant de sa retraite chapeau a été régulièrement réévalué. En 2010, l’enveloppe annuelle avait déjà grossi de 12,5 %. Mais lorsqu’en 2014, âgé de 65 ans, il fait valoir ses droits, le montant s’est considérablement « allégé » puisqu’il ne touche finalement que 160 000 euros par an. L’effet Varin sans doute… « Robert Peugeot, qui a fait toute sa carrière chez PSA a accumulé ses droits à la retraite lorsqu’il était salarié, aujourd’hui, il les fait valoir. Où est la polémique ? », s’insurge-t-on dans son entourage. Du côté de PSA, silence radio. Contacté, le groupe ne souhaite pas faire de commentaire.
Quant aux membres du conseil de surveillance joints par Le Point, ils tombent des nues. Et pour cause : non seulement le sujet n’a jamais été débattu en dehors du comité de rémunération, mais la récente réintégration de Robert Peugeot au sein du personnel de PSA s’est, elle aussi, faite en catimini. L’actuel président du conseil de surveillance, Louis Gallois, n’en aurait jamais été informé, lui qui a renoncé à ses jetons de présence et milite pour des émoluments raisonnables. Dans une famille imprégnée de l’éthique protestante, où l’on a longtemps résisté aux sirènes des délocalisations, cette cachotterie de l’un des leurs risque de faire grincer des dents.
Un problème de gouvernance
L’affaire est d’autant plus ennuyeuse qu’elle pose un problème de gouvernance. En cumulant durant des années un siège au conseil de surveillance avec un contrat de travail au sein du groupe, Robert Peugeot s’est mis en situation de conflit d’intérêts. L’Autorité des marchés financiers, qui aurait dû être informée au motif que PSA et FFP sont cotées, pourrait déclencher une enquête. Robert Peugeot est-il un cas isolé ? D’autres anciens dirigeants ont-ils également bénéficié de conditions dérogatoires, le système étant réputé plus avantageux qu’ailleurs ?
Un audit commandé par le groupe fin 2013, juste après « le scandale Varin », concluait à un régime de retraite chez PSA « globalement un peu plus généreux » que les pratiques du CAC 40 et que ce que recommande le Medef. Désormais actionnaire de PSA à égalité avec la famille Peugeot, l’État pourrait exiger davantage de transparence sur les retraites chapeaux du groupe. Il y a un peu plus d’un mois, découvrant l’entourloupe de l’ex-PDG de Peugeot, le porte-parole du gouvernement, Stéphane Le Foll, avait asséné : « Pour moi, c’est inacceptable. Quelle image, quelle idée on donne de l’exemplarité ? »
Commentaires CGT
Les salariés victimes de 3 années consécutives de gel des salaires et de l’application de l’article L1224-1 du Code du travail (vente d’activités entières à des sous-traitants et perte du statut PSA) apprécieront….